Chaleur verte
CONTEXTE
- Le chauffage des bâtiments a longtemps été le « parent pauvre » des politiques de transition énergétique et climatique de Wallonie et de Bruxelles. En novembre 2020, une mise à jour de la Stratégie wallonne de rénovation a estimé à environ 40% les économies d’énergie réalisables dans le secteur résidentiel d’ici 2050, tout en tablant, dans le secteur tertiaire, sur des bâtiments essentiellement neutres en carbone d’ici à 2040. Il est par ailleurs depuis longtemps question d’une actualisation de la stratégie bois-énergie.
- Un décret Sous-Sol visant notamment à encadrer les géothermies de faible et de grande profondeurs et le stockage géologique de chaleur et de froid a été adopté en Wallonie, sous la précédente législature. Divers sondages et études ont en outre été menés pour évaluer le potentiel de la Région en matière de géothermie peu profonde.
- Le précédent Gouvernement a plusieurs fois matérialisé sa volonté de soutenir le déploiement de réseaux d’énergie thermiques et le développement de la géothermie en territoire wallon :
– en organisant en 2023, un appel à projets d’un montant total de 30 millions d’euros issus du Plan de relance wallon, en faveur du développement de nouveaux réseaux de chaleur issue de source renouvelable et en particulier de la géothermie (12 lauréats),
– en lançant dans la foulée un nouvel appel à projets, doté cette fois d’une enveloppe de 11 millions d’euros, pour la réalisation ou l’extension de réseaux d’énergie thermique, visant plus spécifiquement à soutenir l’émergence de réseaux de type urbain valorisant l’énergie fatale (issue des process de l’industrie ou des cogénérations de grande puissance) ou renouvelable (le solaire thermique industriel),
– en approuvant en juin 2024 le lancement, dans le cadre du Plan de Relance de la Wallonie, d’un appel à candidatures pour la réalisation d’un projet pilote de géothermie minière, dans le bassin minier de Liège, pour un budget total de 11 millions d’euros, en vue d’une finalisation d’ici au 30 septembre 2027. - Dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 14.1 de la directive 2012/27, l’ICEDD a livré à Bruxelles Environnement, en 2021, une étude sur le potentiel en matière d’efficacité et de chaleur et de froid durables en RBC dont il ressort que, même en mettant résolument en œuvre sa stratégie de rénovation à l’horizon 2050 (ou « Stratégie Rénolution ») la Région peut tout au plus espérer diminuer les besoins en chaleur de son patrimoine bâti d’environ 37%.
- En Région de Bruxelles-Capitale, le placement d’une installation de chauffage au mazout est, sauf dérogation, interdit depuis le 1er juin 2025.
- Une Task Force Energie 2050, composée de Bruxelles Environnement, Brugel et Sibelga a débouché sur une première « Perspective partagée sur la décarbonation de la chaleur et du froid d’ici à 2050 », dont les conclusions devront progressivement déboucher sur l’adoption des options technologiques à privilégier pour chaque quartier, en fonction des spécificités de son bâti et des sources de chaleur verte localement disponibles, sachant qu’« en 2050, environ 70% de la demande d’énergie se trouvera dans une zone à très haute densité de demande de chaleur qui pourrait théoriquement permettre le développement de réseau de chaleur basse température. »
- Au terme d’une longue série d’échanges formels et informels avec EDORA sur la meilleure façon de décarboner le chauffage des bâtiments dans la Capitale, Sibelga semble peu à peu renoncer à promouvoir pour ce faire la piste d’un recours à l’hydrogène et a même commencé à s’investir dans le déploiement de réseaux d’énergie thermique.
ENJEUX POUR LE SECTEUR
- Une amplification rapide et significative de la transition énergétique dans le domaine de la chaleur, s’appuyant notamment sur une sortie progressive des systèmes de chauffage recourant aux combustibles fossiles. Il s’agit donc d’ajouter aux normes d’intégration des renouvelables et aux mécanismes de soutien, un calendrier de sortie progressive des systèmes de chauffage fossiles, un gel de l’extension des réseaux de gaz naturel et un encadrement de la publicité et des offres de raccordement au rabais des GRD et des fournisseurs de chaudières à combustibles fossiles.
- La mise en place d’un mécanisme de soutien spécifique pour toutes les sources de chaleur verte et les réseaux de chaleur, tenant compte des investissements de départ généralement élevés requis et des temps de retour sur investissement difficilement conciliables avec les impératifs de rentabilité à court terme des institutions financières et des porteurs de projet privé.
- Pour arriver à une progression importante des pompes à chaleur tant aérothermiques que géothermiques, il conviendrait
- de prendre toute mesure favorisant un découplage plus marqué entre les prix des énergies carbonées et ceux de l’électricité verte (fiscalité carbone, plus grande sélectivité des aides et subventions couvrant la consommation d’énergies fossiles, etc.), afin de continuer à favoriser l’électrification croissante de notre économie,
- de proposer et de promouvoir une tarification plus dynamique des diverses composantes de la facture d’électricité pour ce type d’utilisateurs (« smart heating »), tenant compte non seulement du niveau de sollicitation des réseaux, mais également de l’abondance d’électricité verte dans le système énergétique,
- de faciliter les recours à une combinaison de pompes à chaleur et d’appoints fonctionnant au bois-énergie, que ce soit dans des cas individuels ou dans le cadre de systèmes collectifs, avec réseau de chaleur (hybridation technologique/solutions poly-énergétiques), pour diversifier les sources de chaleur verte en vue des pics de consommation et des épisodes de « dunkelflaute ».
POSITIONNEMENT D’EDORA
- Sous la pression d’EDORA, le projet d’AGW sur l’intégration des SER dans le bâtiment a été complété avant soumission au Conseil d’Etat pour exclure les systèmes de chauffage au mazout ou au charbon des constructions neuves et revoir le pourcentage de SER minimal à atteindre, généralement à la hausse (de 25 à 35%), mais aussi à la baisse (de 25 à 15%) pour les bâtiments neufs d’une superficie totale supérieure ou égale à 1000 m2 (sur demande d’Embuild).
- Le nouveau Cabinet Energie semble par contre vouloir, comme le précédent, invoquer l’urgence et la méthodologie retenue jusqu’ici – à savoir le recours à un calcul de PEB global pour fixer les exigences SER – pour soustraire la Wallonie à ses obligations en matière de chaleur renouvelable en cas de rénovation profonde, en balayant ainsi les objections du Conseil d’Etat (et les nôtres …).
- En Région de Bruxelles-Capitale, conformément aux demandes d’EDORA, les chaudières fossiles sont interdites dans les constructions neuves depuis le 1er janvier 2025 et dans les rénovations lourdes à partir du 1er janvier 2030.
- EDORA plaide sans relâche pour que les futures transpositions de directives s’appuient enfin sur un inventaire véritablement transversal des obligations des différentes directives pertinentes en matière d’intégration des SER dans le secteur des bâtiments (PEB, Renouvelables, Efficacité énergétique).
- Des rencontres ont par ailleurs eu lieu, en janvier et avril 2025, avec le Ministre wallon de l’Environnement et divers membres de son cabinet, afin d’attirer leur attention :
– sur l’effet bloquant des règles applicables en matière de forages destinés à la géothermie ouverte,
– sur l’opportunité d’interdire l’incinération sauvage de déchets de taille, afin de plutôt promouvoir le développement des filières de traitement et de valorisation énergétique de cette biomasse solide.
PERSPECTIVES ET PLAN D’ACTION
- Dialogue régulier avec les Ministres wallon et bruxellois de l’Energie et leurs Cabinets, au sujet de leurs plans de sortie des systèmes de chauffage recourant aux énergies fossiles.
- EDORA suivra attentivement la finalisation et la mise en œuvre de la Stratégie Biomasse-Energie annoncée par le Ministre wallon de l’Energie.